Le roman se déroule durant un été. Dans les années 60, Daniel Price a 18 ans, il vient de passer son Bac et songe, sans grande conviction, à sa vie d'adulte. Il vit à East Chicago, ville industrielle dominée par la Oil Companie. La vie familiale de Daniel est conditionnée par un père dépressif qui se pose en perpétuelle victime. Ses sarcasmes envahissent la vie familiale et altèrent la confiance difficile que Daniel tente de trouver en lui. L'adolescent se cogne régulièrement à la défaite paternelle qui retentit dès les premières pages. L'arrivée d'une adolescente fantasque, Rachel Temerson, transforme la vie de Daniel : émois, espoirs, désirs, premiers rêves d'amour mais Rachel se dérobe sans cesse tout en provocant Daniel. Le récit aborde un tournant plus dramatique quand Daniel décide de prendre sa vie en main. C’est un grand roman sur la fin de l’adolescence dont Steve Tesich évoque avec beaucoup de subtilité et de justesse tout ce mélange de violence, de démesure, de naïveté et de romantisme.
Ce livre est un hymne magnifique à l'adolescence, ses outrances et ses rêves. Durant l'été 1979, en Californie, deux sœurs se préparent à passer leurs deux mois de vacances à vagabonder dans la montagne toute proche, sous le regard un peu distant d'une mère dépressive et d'un père fantasque. Ce dernier, inspecteur de police, va devenir pour quelques mois un héros, car on lui confie la direction de l'enquête sur des meurtres en série commis dans la région. Le nouveau statut de leur père, donne aux deux jeunes filles une autorité nouvelle auprès de leurs camarades.
Trente ans plus tard, devenue écrivain, Rachel raconte l'été qui a bouleversé la vie des deux sœurs. Conduit comme un thriller, ce roman passionnant décrit une très belle relation père – filles.
Harriet Burden artiste plasticienne New Yorkaise, épouse d'un célèbre galeriste, a vécu jusqu'au décès de ce dernier, une existence relativement effacée. Elle n'a pourtant jamais cessé de nourrir son univers artistique et de le faire progresser. Elle ne s'est jamais décidée à exposer, redoutant que son double statut de femme et d'épouse d'un galeriste reconnu, brouille les cartes. A la mort de ce dernier, H. Burden est une femme en colère qui souhaite en découdre avec ce monde du marché de l'art dominé par un sexisme revendiqué et un snobisme exacerbé.
Lire la suite : "Un monde Flamboyant" Siri Hustvedt - éd Actes sud
C'est un récit très intime et très surprenant sur la disparition et sur le deuil. Ce livre parle des fantômes qui nous hantent et ressemble à un exercice d'exorcisme qui convoquent les cauchemars, les délires, les peurs générées par la mort et la disparition des êtres chers. Ce roman se construit sur une succession de récits qui semblent indépendants les uns des autres et qui racontent plusieurs morts, plusieurs formes d'abandon : mort clinique, disparition... l'auteur joue à cache-cache avec le lecteur, le sujet est dissimulé au cœur du roman.
Nous reconnaissons le style très personnel et parfois déroutant de O. Rosenthal, qui aime tordre le cou aux clichés, mélanger des genres et faire que tragique et grotesque se côtoient, sans omettre de faire affleurer une dimension poétique et burlesque afin de mieux contourner la réalité.
Big brother" Lionel Shiver - éd Belfond
Livre inspiré par le combat de son frère contre son obésité, Big Brother se lit comme une charge contre la société américaine qui ne manque de rien et qui a plus que jamais faim. Que feriez-vous si votre grand frère, jazzman, idole de votre enfance débarquait chez vous trois fois plus gros qu'avant ? Comment faire face au dégoût, comment l'aider à comprendre que ce n'est pas une maladie mais un suicide ? L'auteur n'en a pas eu le temps puisque son frère est mort trop vite pour qu'elle tente de pouvoir l'aider. Alors elle s'est lancée dans l'écriture de ce livre coup de poing.
"Congo Inc" In Koli Jean Bofane - "d Actes Sud
Très grand roman, In Kolii Jean Bofane l'a osé, avec lyrisme, il nous entraîne dans toutes les vies d'une Afrique malmenée mais jalousement gardienne de ses coutumes. Dans sa forêt profonde le jeune pygmée Isookànga rêve à son avenir technologique et planétaire, dénicher l'idée géniale que peuvent lui permettre, croit il, ses connexions Internet et les jeux qui le rendent fort, réactif et inventif. Il part à Kinshasa mettre en œuvre ses désirs et rencontrer un parent influent. Ce sera une succession de déconvenues nous entrainant de plain pieds, dans le mondialisme économique et politique, l’exploitation des riches ressources du "tiers monde". Par une écriture magnifique l'auteur décrit la drolatique exubérance africaine, en couleurs et langage, tout en nous servant, au coin d'une page, un humour "sombre" sur les pires exactions perpétuées sur l'homme pour assouvir les basses ambitions des puissants planétaires. La Chine est présente dans un parallèle sur la souffrance des peuples. Aussi les États Unis en grand manitou, une guerre en sert une autre. L'auteur nous entraîne dans lune folie sans foi mais aux lois très strictes. Michèle L./Club de lecture
"Qu'attendent les singes" Yasmina Khadra - éd Julliard
Sur la base d’une enquête policière, le livre met en lumière les coulisses du pouvoir algérien dans une société gangrénée par la corruption. Ce dernier est entre les mains d’une poignée d’hommes âgés, les rboba, qui autrefois ont eu leur heure de gloire en œuvrant pour l’indépendance du pays. Depuis, ils sont riches, intouchables et odieusement privilégiés. Omnipotents, ils font la pluie et le beau temps dans le domaine politique, économique et médiatique. Le personnage principal du roman est féminin, il s’agit de Nora, la commissaire chargée de l’enquête. C’est une femme aux formes généreuses qui affirme ses choix, tant professionnels que sexuels. Dans un pays profondément machiste, être commissaire et homosexuelle, c’est s’exposer en permanence au risque d’être moquée, humiliée et même tuée. Le livre est prenant, bien écrit et édifiant. Pascaline S. / Club de lecture
"Telegraph avenue" Michael Chabon - éd R. Laffont
Magistralement orchestrées, les aventures jazz, funk, blues et soul des habitants de Telegraph Avenue composent l'épopée réjouissante de la Californie, d'hier et d'aujourd'hui. Sur Telegraph Avenue, à Oakland, en Californie, subsiste un petit paradis des vinylles de collection, Brokeland. Refuge de toute une faune d'habitués, il est tenu par deux amis de longue date.Mais le projet d'implantation d'un gigantesque magasin de disques menace son existence.
De livre en livre, Michael Chabon emprunte divers genres littéraires pour mieux évoquer les multiples facettes d'une Amérique de légende : "Telegraph Avenue" est un roman musical. "Les extraordinaires aventures de Kavalier et Clay" déploie la magie d'un nouvel art, la bande dessinée. "Le club des policiers yiddish" subvertit les codes du roman noir.
"Un homme ça ne pleure pas" Faïza Guène - éd Fayard
Né à Nice de parents algériens, Mourad voudrait se forger un destin. Son pire cauchemar : devenir le vieux garçon obèse aux cheveux poivre et sel, nourri à base d'huile de friture par sa mère. Pour éviter d'en arriver là, il lui faudra se défaire d'un héritage familial pesant. Ce récit plein d'humour et de tendresse dresse le portrait d'une famille déchirée par les choix contradictoires de chacun.
Faïza Guène s'est imposée, à partir de son premier roman, comme une des voix les plus originales de la littérature contemporaine. L'humour est partout présent dans ce livre, la mère veille aux traditions, omniprésente dans la vie de ses enfants, elle rassemble sa tribu autour d'abondants plats de nourriture. Elle n'hésite pas à se montrer tyrannique et excessive, quitte à étouffer ses enfants sous trop de bienveillance. Le père incarne le rôle du taiseux solitaire qui n'intervient qu'en cas de grande nécessité pour essayer de détramatiser les situations. Difficile de grandir pour les trois enfants issus de ce couple, la fille aînée quittera le foyer dans la rupture, la seconde fille se conformera aux voeux de sa mère et le fils aura bien de la peine à se frayer un chemin hors du nid. C'est une analyse très juste et très sensible qui relate le conflit des générations dans une famille immigrée algérienne aujourd'hui.
"La fête de l'insignifiance » Milan Kundera – éd Gallimard
Milan Kundera n'avait pas publié depuis 2003. Ce magistral récit condense, en 140 pages, toute l'essence de la pensée de ce très grand écrivain. Il reprend ici ses thèmes de prédilection en les traitant avec une fantaisie extravagante. Si nous devions résumer en une seule phrase ce dernier texte, nous pourrions citer l'un des quatre personnages : « l'insignifiance est l'essence de l'existence ». Kundera nous incite à aimer cette insignifiance parce qu'elle est partout, alors inutile de se prendre au sérieux. Il en fait ici la démonstration.
Lire la suite : "La fête de l'insignifiance" Milan Kundera - éd Gallimard
« La fille de mon meilleur ami » Yves Ravey – éd de Minuit
Bienvenue dans l'univers de cet auteur que nous suivons de très près et dont nous nous réjouissons d'accueillir ce nouveau roman, un an après « Un notaire peu ordinaire ». Lecteur méfiez-vous, car rien n'est limpide dans l'univers de Yves Ravey, tout détail compte, rien n'est laissé au hasard malgré ce semblant d'insignifiance et de légèreté. Y. Ravey nous livre une histoire cousue de fils de blancs, avec des personnages, archétypes des anti-héros condamnés à échouer. Une histoire qui n'en n'est pas une, et des bombes à retardement qui exploseront fatalement au cours du récit.
Lire la suite : "La fille de mon meilleur ami" Yves Ravey - éd de Minuit