Où donc est passé Léo ? Son entourage s’interroge sur le mystère de sa disparition. Qui était-il vraiment ? Que fuyait-il ? S’il vit toujours, où est-il allé se perdre ? Nul ne se doute qu'il vit désormais dans un autre monde, celui des séries télévisées, où tout fait écho, à sa mémoire comme à ses rêveries. Vingt ans après le succès de "Saga", Tonino Benacquista nous rappelle que seule la fiction a le pouvoir de réparer le réel. Tonino Benacquista nous entraîne sur la piste d'un homme qui a choisi de fuir le réel, il surf d'une série à l'autre, emprunte une réplique, ou la situation d'une série et la réutilise dans le contexte d'une autre, tout en y mêlant ses souvenirs. C'est un individu ordinaire dépassé par son époque, celle de la connexion immédiate ou de l'info en continu, pris de vertige, il s'enferme chez lui pour chercher les réponses à ses questions en passant de l'autre côté du miroir, et en se laissant complètement absorbé par l'univers de la fiction. Il ne vit pas par procuration l'histoire des personnages, il utilise les sujets ou les situations pour essayer de comprendre ce qui le hante, il est perpétuellement dans un monologue intérieur. D'autres personnages traversent ce roman, Richard/Rich milliardaire le jour, SDF la nuit, l'écrivain Harold qui représente le monde d'avant... Une quête effrénée d'identités morcelées qui prend, comme toujours chez T. Benacquista, des chemins de traverses inédits.
"A l'attention du service des manuscrits." C'est accompagnés de cette phrase que des centaines de romans écrits par des inconnus circulent chaque jour vers les éditeurs. Violaine Lepage est, à 44 ans, l'une des plus célèbres éditrices de Paris. Elle sort à peine du coma après un accident d'avion, et la publication d'un roman arrivé au service des manuscrits, Les Fleurs de sucre, dont l'auteur demeure introuvable, donne un autre tour à son destin. Particulièrement lorsqu'il termine en sélection finale du prix Goncourt et que des meurtres similaires à ceux du livre se produisent dans la réalité. Qui a écrit ce roman et pourquoi ? La solution se trouve dans le passé. Dans un secret que même la police ne parvient pas à identifier.
1987. Yves quitte le confort de la maison familiale pour suivre des études de droit à Paris. Très vite, le jeune homme se sent rejeté par la capitale et les autres étudiants, et rêve d’une 'vie audacieuse'. Dans un café, il rencontre Évelyne, âgée d’une trentaine d’années et professeure de piano. Elle s’occupe tous les dimanches de son fils de treize ans, Jérôme, qui vit chez son père car elle a refusé d’en assumer la garde. Évelyne est secrète, distante, insaisissable. Une relation amoureuse naît pourtant entre Yves et la jeune femme et, après la mort du père de Jérôme, ils vivent ensemble tous les trois quelques mois dans un appartement en banlieue parisienne. Mais un jour Évelyne abandonne les deux garçons... Chacun va essayer à sa façon de combler cette absence. L’écriture délicate d’Elena Costa installe une atmosphère de mélancolie douce et lumineuse pour dessiner, en creux, le portrait d’une femme éprise de liberté.
Et si notre esprit fonctionnait encore quelques instants après notre mort biologique ? 10 minutes et 38 secondes exactement. C’est ce qui arrive à Tequila Leila, prostituée brutalement assassinée dans une rue d’Istanbul. Du fond de la benne à ordures dans laquelle on l’a jetée, elle entreprend alors un voyage vertigineux au gré de ses souvenirs, d’Anatolie jusqu’aux quartiers les plus mal famés de la ville. En retraçant le parcours de cette jeune fille de bonne famille dont le destin a basculé, Elif Shafak nous raconte aussi l’histoire de nombre de femmes dans la Turquie d’aujourd’hui. À l’affût des silences pour mieux redonner la parole aux « sans-voix », la romancière excelle une nouvelle fois dans le portrait de ces « indésirables », relégués aux marges de la société.
" Ce jour-là, le 25 août 2015, l'événement n'est pas : un ours attaque une anthropologue française quelque part dans les montagnes du Kamtchatka. L'événement est : un ours et une femme se rencontrent et les frontières entre les mondes implosent. Non seulement les limites physiques entre un humain et une bête qui, en se confrontant, ouvrent des failles sur leurs corps et dans leurs têtes. C'est aussi le temps du mythe qui rejoint la réalité ; le jadis qui rejoint l'actuel ; le rêve qui rejoint l'incarné ". C'est un récit unique car cette femme, anthropologue, a croisé l'ours, l'a affronté et s'en est sortie vivante mais à jamais transformée. Elle raconte l'attaque, les soins, sa longue reconstruction, ses allers et retours entre les montagnes du Kamtchatka et Grenoble dont elle est originaire. Elle oscille entre deux cultures, celle qui croit aux fauves et aux forces de la nature et celle qui la considère comme une rescapée. Elle est devenue pour les habitants de ces territoires un être sacré, en occident elle est la victime d'une attaque. Elle va tenter de démêler les liens qui l'attachent à ces deux cultures pour trouver un sens à ce qui lui est arrivé. Un récit passionnant autant que déroutant qui donne un accès intime à cette rencontre avec un autre monde. "Revenir de cela implique une métamorphose physique, intérieure et une métamorphose du regard que l'on porte sur les choses". Exceptionnel.
Comme un funambule qui avance, yeux grands ouverts, sur une corde au-dessus du vide, Bulle Ogier parcourt les étapes de sa vie d'enfant, de femme, d'actrice, de mère. Une vie jamais banale, pour le meilleur (l'art, la création, la fréquentation de grandes figures comme Duras, Rivette ou Chéreau), ou pour le pire (la mort de sa fille Pascale, évoquée avec délicatesse et intensité). On pourrait énumérer les péripéties, les événements, établir des listes, mais un seul mot dit à quelle expérience le lecteur est convié : enchantement. Sur un ton qui n'appartient qu'à elle, l'actrice de tant de films, de tant de mises en scène théâtrales, la protagoniste de tant d'aventures, exerce une sorte de magie, on est avec elle, on est parfois effaré, et toujours touché, ému, bouleversé. On rit aussi, ou on sourit. Bref, les mystères parfois contradictoires de la vie, mis en langue : ce qu'on appelle, simplement, la littérature.
C’est ce soir-là, après avoir copieusement arrosé l’arrivée du nouveau venu, que nous avons décidé dans l’euphorie et à l’unanimité de le baptiser Zingaro. Il endosserait le nom de notre théâtre équestre et musical, premier nommé il donnerait à la troupe sa descendance. Plus tard, tandis que la fête se répandait dans la nuit et que s’épanchaient les cœurs imbibés, je me suis surpris, comme souvent, à ne plus trouver ma place. J’éprouve dans ces moments le besoin de me retirer ; de m’évaporer sans au revoir ni salut. Je suis allé le rejoindre dans son box, je n’ai pas allumé, je me suis glissé dans son antre comme on se glisse sous les draps de l’amante endormie. Il était couché sur le flanc gauche, je me suis assis près de lui, il a tourné la tête vers moi sans se relever, un peu étonné de me voir, comme sorti d’un songe.
Cette nuit-là, nous avons fait un pacte : j’allais contaminer son animalité et il allait me permettre d’exister parmi les hommes. Aux humains de mon espèce, nous allions nous révéler. Pour la vie.' Magnifique galerie de portraits équins, qui racontent avec poésie et délicatesse, les liens singuliers qui se sont tissés entre l'homme et ses chevaux. A lire, même si l'univers du cheval ne vous est pas familier, vous serez emporté par la magie de ces rencontres. Une grande leçon d'amour et de respect.
15 juillet 1945, Los Alamos, Nouveau-Mexique. Robert Oppenheimer, brillant scientifique et créateur de la bombe atomique, compte les heures, les minutes. Il attend le lancement de l’essai nucléaire Trinity.
Un agent du FBI, une journaliste ou encore sa secrétaire particulière témoignent de celui qu’il était. À travers sept récits s’élabore par petites touches le portrait kaléidoscopique d’un homme de l’ombre qui a transformé le destin de l’humanité. Trinity explore les confins de la culpabilité, son influence sur les corps et les esprits. Ici, les histoires personnelles des narrateurs se mêlent à l’histoire mondiale, et les fantômes des victimes des bombes d’Hiroshima et Nagasaki surgissent à chaque page.
En interrogeant le rapport entre réalité et fiction, intime et universel, Louisa Hall compose un grand roman sur le monde terrifiant engendré par l’arme qui aurait dû en finir avec toutes les armes.
Orren et Aloma sont deux âmes à vif, deux jeunes êtres à fleur de peau. Elle est orpheline, élevée dans une école missionnaire catholique et dotée d'un talent rare pour le piano. Il est fils de fermiers, fier et taciturne. Ils sont amoureux et leur vie bascule le jour où la famille d'Orren meurt dans un accident de voiture, le laissant responsable d'une vaste plantation de tabac, d'une terre aride et d'une maison silencieuse où flotte encore la présence des êtres disparus. Livrée à elle-même dans ces lieux si peu familiers au coeur des montagnes du Kentucky, Aloma devra trouver sa place dans cette nouvelle vie, déchirée entre son désir de conserver sa liberté de femme et la nécessité de se soumettre aux engagements du couple. Tous les vivants a la puissance évocatrice d'une parabole et le charme intemporel d'un conte. C. E. Morgan y dresse un remarquable portrait de femme, intime et saisissant, et dépeint avec une éclatante justesse le processus d'enracinement des êtres au sein d'une terre et d'une famille.
En 1944, Mathilde, une jeune Alsacienne, s'éprend d'Amine Belhaj, un Marocain combattant dans l'armée française. Après la Libération, elle quitte son pays pour suivre au Maroc celui qui va devenir son mari. Le couple s'installe à Meknès, ville de garnison et de colons, où le système de ségrégation coloniale s'applique avec rigueur. Amine récupère ses terres, rocailleuses ingrates et commence alors une période très dure pour la famille. Mathilde accouche de deux enfants : Aïcha et Sélim. Au prix de nombreux sacrifices et vexations, Amine parvient à organiser son domaine, en s'alliant avec un médecin hongrois, Dragan Palosi, qui va devenir un ami très proche. Mathilde se sent étouffée par le climat rigoriste du Maroc, par sa solitude à la ferme, par la méfiance qu'elle inspire en tant qu'étrangère et par le manque d'argent. Les relations entre les colons et les indigènes sont très tendues, et Amine se trouve pris entre deux feux : marié à une Française, propriétaire terrien employant des ouvriers marocains, il est assimilé aux colons par les autochtones, et méprisé et humilié par les Français parce qu'il est marocain. Il est fier de sa femme, de son courage, de sa beauté particulière, de son fort tempérament, mais il en a honte aussi car elle ne fait pas preuve de la modestie ni de la soumission convenables. Aïcha grandit dans ce climat de violence, suivant l'éducation que lui prodiguent les Soeurs à Meknès, où elle fréquente des fillettes françaises issues de familles riches qui l'humilient. Selma, la soeur d'Amine, nourrit des rêves de liberté sans cesse brimés par les hommes qui l'entourent. Alors qu'Amine commence à récolter les fruits de son travail harassant, des émeutes éclatent, les plantations sont incendiées : le roman se clôt sur des scènes de violence inaugurant l'accès du pays à l'indépendance en 1956. Premier volet d'une trilogie qui s'inspire de l'histoire de la famille de l'auteure. On retrouve le ton sec, très direct mais aussi très poétique de Leïla Slimani qui recherche dans l'histoire de ses deux pays d'origine, le Maroc et la France, à comprendre ces êtres dont elle est issue, dans leurs attirances, leurs contradictions et leur volonté farouche de ne renoncer à rien. Récit qui raconte ce qu'était le Maroc rural au temps du protectorat français.
C'est un roman noir, au sens où il ambitionne de dire quelque chose du monde social, de sa dureté, de sa folie, de sa barbarie. Un roman qui se confronte aux forces du mal, qui raconte l’enfance dévastée, l’injustice, la drogue, la violence dans une cité de Marseille entre les années 80 et 2000.
Le narrateur, Karel, est un garçon des quartiers Nord. Il grandit dans la cité Antonin Artaud, cité fictive adossée au massif de l’Etoile et flanquée d’un bidonville, « le passage 50 », habité par des gitans sédentarisés. Karel vit avec sa sœur Hendricka et son petit frère Mohand, infirme. Ils essaient de survivre à leur enfance, entre maltraitance, toxicomanie, pauvreté des parents, et indifférence des institutions. Le roman s’ouvre sur l’assassinat de leur père. Les trois enfants vont s’inventer chacun un destin. Karel s’interroge : « Qui a tué mon père ? » Et fantasme sur la vie qu’il aurait pu mener s’il était né sous une bonne étoile, s’il avait eu des parents moins déviants et moins maltraitants. Il se demande s’il n’a pas été contaminé par la violence, s’il n’est pas dépositaire d’un héritage à la fois tragique et minable, qui l’amènerait à abîmer les gens comme son père l’a fait. Il veille sur son petit frère et voit sa sœur réussir une carrière au cinéma. C’est aussi le roman de Marseille, d’avant le MUCEM et d’avant la disparition du marché de la Plaine, qui constitue la géographie sentimentale du livre. Et c’est une plongée romanesque dans toute une culture populaire dont l’auteure saisit l’énergie et les émotions à travers les chansons de l’époque, de Céline Dion à Michael Jackson, en passant par IAM , Cheb Hasni, Richard Cocciante ou Elton John. Un récit puissant, intelligent, sans compromis qui vous aspire littéralement. Exceptionnel, dans la compréhension et la mise en mots, de ce que peut-être la terreur enfantine soumise à la violence parentale physique et verbale, cette recherche éperdue d'un ailleurs y compris celui qui ne sauve pas forcément.