"Lointain souvenir de la peau" Russel Banks - éd Actes Sud

A Miami, renommé pour les besoins du roman « Calusa, » vivent, sous le pont routier Claybourne, des repris de justice, condamnés pour abus sexuels sur mineurs. Ils ont trouvé refuge sous ce viaduc, où ils forment une communauté de marginaux, sans aucune ressource. Ils sont tous en liberté conditionnelle, affublés d'un bracelet électronique, ce qui permet à tout en chacun de les identifier via Internet. Assignés à résidence dans un périmètre très restreint, ce qui les tient éloignés des zones urbaines abritant des mineurs, ils sont soumis à un contrôle judiciaire strict et hebdomadaire. Kid, l'un d'eux, a 22 ans, et vit depuis une année sous une tente, avec son iguane Iggye. Il travaille dans un restaurant, s'accommode de sa solitude et des menaces quotidiennes inhérentes à son mode de vie. Il sait qu'il devra vivre ainsi, exclu et en marge de tout, durant 10 ans avant de pouvoir réintégrer son statut de citoyen.

Kid, le personnage central du roman, est ce qu'on appelle un « outkast ». Petit, plutôt chétif, il vit depuis tout jeune en état de carence affective et intellectuelle. Sa mère, qui l'a élevé seule, s'est débrouillée comme elle pu, mais elle ne réussit pas à lui donner la force et la confiance qui lui auraient permis de devenir un adulte parmi tant d'autres. Très tôt, Kid fut happé par le monde des images et des espaces virtuels que l'on trouve sur Internet. Il navigua très jeune sur les sites pornographiques, et se construisit ainsi une identité affective et sexuelle sur des images avec lesquelles il n'eut aucune distance. Un étrange professeur, sociologue au passé trouble, enquête sur les condamnés sexuels. Il choisit Kid comme sujet de recherches afin de donner, comme le fait Russel banks, la parole à ces marginaux. Cet adulte, apparemment bienveillant, porte lui aussi les stigmates d'un autre fléau américain : l'obésité. Comme le jeune repris de justice, il vit une forme de dématérialisation de son corps, étant contraint lui aussi de subir les débordements de la chair, connaissant lui aussi l'addiction et la marginalité, malgré une reconnaissance incontestable au sein de la communauté intellectuelle. Un des thèmes principaux de ce livre est la dématérialisation : les personnages que nous y croisons ont perdu contact avec leur propre corps. Les jeunes individus communiquent de plus en plus intimement les uns avec les autres par internet, sans pour autant se fréquenter, alimentant ainsi des fantasmes synonymes de confusion quant à l'identité sexuelle de ceux qui s'y adonnent, rendant également de plus en plus difficile une vie amoureuse satisfaisante et «équilibrée. Cette Confusion est ce qui amena Kid à cette vie d'exclus, ce que Russel Banks cherche à montrer dans un roman alarmiste et inquiétant. Le sexe virtuel y devient, tout comme l'obésité, une épidémie en pleine propagation, traitée avec la plus totale inconscience et hypocrisie.

Prochainement

Mercredi 28 février 

manouchian

Missak et Mélinée Manouchian, deux étrangers, arméniens et communistes, entrent au Panthéon le 21 février 2024. La valeur symbolique de cet événement est majeure. Deux orphelins du génocide des Arméniens devenus héros de la Résistance française. Denis Peschanski, historien et co-auteur du livre retracera avec vous ce parcours documentaire nourri d’archives dont de nombreux inédits.

Lieu : 19h, Bibliothèque Benoîte Groult. Réservation conseillée

Mardi 12 mars 

Droits des femmes. Où en sommes-nous ?

tortureblanche

Une table ronde pour débattre et échanger avec Sophia Aram, Laure Daussy et Iris Farkhondeh. "Femmes, Vie, Liberté" sera l’étendard de cette soirée consacrée aux femmes et à leurs droits dans le monde. "Torture blanche" de Narges Mohammadi, prix nobel de la paix 2023, parait le 6 mars.

Lieu : 19h, Bibliothèque Benoîte Groult. Réservation conseillée

Jeudi 25 avril 

 leconvoi

Rencontre avec Beata Umubyeyi Mairesse

Le 18 juin 1994, quelques semaines avant la fin du génocide des Tutsi au Rwanda, Beata Umubyeyi Mairesse, alors adolescente, a eu la vie sauve grâce à un convoi humanitaire suisse.Treize ans après, elle entre en contact avec l'équipe de la BBC qui a filmé et photographié ce convoi. Commence alors une enquête acharnée (entre le Rwanda, le Royaume-Uni, la Suisse, la France, l'Italie et l'Afrique du Sud) pour recomposer les événements auprès des témoins encore vivants : rescapés, humanitaires, journalistes. Nourri de réflexions sur l'acte de témoigner et la valeur des traces, "Le convoi" offre une contribution essentielle à la réappropriation et à la transmission de cette mémoire collective.

Lieu : 19h, Bibliothèque Benoîte Groult. Réservation conseillée

 

Lire la suite...

Connexion