H. Mingarelli est un auteur rare qui sous une apparente simplicité, avec une délicatesse et une sobriété extrêmes, évoque le poids des conflits qui écrasent les humains et ravagent les vies.
C'est un auteur qui n'écrit pas sur les conflits mais autour des conflits, sur l'intime des hommes touchés de près ou de loin par les guerres. Un style resséré, une écriture visuelle qui donnent à voir, par les gestes répétitifs du quotidien, les tensions et les affections qui minent en silence ces personnages.
En Israël, près du lac de Tibériade et de la ville de Beit Zera, Stépan a pour seule compagnie sa chienne gagnée par la vieillesse et dont il a décidé d'abréger les souffrances.Tous les jours, il fabrique des boites en carton que son ami Samuelson lui achète. Et tous les jours, il écrit à son fils Yankel qui a fui le pays et vit en Nouvelle-Zélande. Un soir, en bordure de forêt, il aperçoit un jeune garçon Amghar. Stépan l'ignore mais le jeune garçon revient. Peu bavard comme Stépan, le jeune Arabe vient de Beit Zera situé à plus d'une heure de marche. Il semble plus attiré par l'animal que par son maître, mais cela ne semble pas déranger Stepan qui préfère garder ses distances. Peu à peu il accepte que le jeune garçon s'occupe de la chienne. Alors Stepan commence à attendre chaque soir sa venue. Une fois par mois, Samuelson vient chercher ses boîtes et rapporte à Stépan les vivres dont il a besoin. L'occasion pour des deux amis de passer la soirée à boire et de se rappeler leur jeunesse à Jaffa quand ils contrôlaient les Palestiniens aux postes-frontières.
Avec une écriture épurée où chaque mot sonne juste, l'auteur installe un cadre et un quotidien qui se dessinent pour le lecteur comme une mise en scène de théatre. Et comme si le temps était suspendu à la météo et aux vols des oiseaux, on découvre l'histoire des personnages de ce huis clos. Le conflit israélo-palestinien a façonné leurs vies, un conflit jamais évoqué directement mais qui apparaît par petites touches, cette guerre larvée les condannent à l'attente, à la solitude, au silence et au mutisme. A peine 160 pages pour dire, avec très peu de mots, la condition des hommes dans les pays en guerre. Hubert Mingarelli a éjà écrit une vingtaine de romans et nouvelles.