La sélection du club de lecture en format poche.
Retrouvez la présentation de ces livres dans la rubrique poche.
Evénement : rencontre avec Annie Cohen-Solal pour la présentation de sa biographie consacrée au peintre Mark Rothko
Spécialiste de l'histoire de l'art et des artistes aux Etats-Unis, Annie Cohen-Solal signe avec cette biographie, le troisième volet de cette étude qu'elle mène depuis une vingtaine d'année. Ce livre évoque toute la vie et tout le travail de recherche de ce peintre, devenu à la moitié du 20ème siècle, le maître de l'abstraction. Une soirée extrêment riche en échanges au cours de laquelle le public a pu apprécier le savoir, le talent et la générosité de notre invité. Nous en sommes encore tout ébloui et nous l'en remercions infiniment. Retrouvez dans la rubrique"événements" les photos de la soirée.
A la une en avril 2014 : repérage
Rendez-vous à la rubrique "notre sélection" pour prendre connaissance des livres chroniqués.
Découvrez dans la rubrique "Notre sélection" les romans de la rentrée que nous vous conseillons.
A la une en janvier 2014
A l'occasion du 41 ème festival d'Angoulême, nous mettons à votre disposition un catalogue qui recense, par genre, les dernières parutions de l'année dont certaines seront en compétition fin janvier.
La bande dessinée couvre des champs d'expressions de plus en plus vastes. Le roman graphique autobiographique, brillamment introduit par Marjane Satrapi avec « Persepolis », met en scène des narrations qui mêlent l'expérience personnelle à l'histoire contemporaine.
Les auteurs s'emparent de sujets multiples « Gaza », « Chroniques de Jérusalem » ou de récits intimes, comme en 2013, Alison Bechdel « C'est toi ma maman » : une quête identitaire qui convoque les différentes facettes de la figure maternelle. « Le bleu est une couleur chaude » de Julie Maroh est le support narratif, à l'origine du film « La vie d'Adèle » de A.Kechiche , Palme d'or au festival de Cannes de 2013.
Le récit historique se développe et tend à revisiter l'histoire, « Les temps mauvais » parlent du quotidien de la population civile durant la guerre d'Espagne, « Mauvais genre » de Chloé Cruchaudet reprend le thème de « la garçonne et l'assassin » et évoquent les blessures psychiques liées à la guerre.
De plus en plus d'adaptations littéraires s'emparent de ce media : J. Ferrandez a repris « L'étranger » d'A. Camus, Charly 9 de J. Teulé est depuis peu adapté par R. Guérineau. « L'astragale » d'A. Sarazin, « Le dalhia noir » de J. Ellroy, jusqu'à « La recherche du temps perdu » de M. Proust.
La narration graphique se penche sur la biographie d'artistes comme Picasso, Egon Schiele, le philosophe Thoreau... ou de personnalités engagées comme Olympe de Gouge ou Benoite Groult.
Les domaines d'investigation de la bande dessinée n'ont plus de limites.
L'éclectisme et la richesse de la production internationale de la bande dessinée la fait définitivement sortir du genre des « comics » pour exister en tant que support culturel historique, littéraire et philosophique.
Nous vous invitons à faire un détour dans le petit espace que nous lui consacrons à la librairie et à consulter notre sélection dans la rubrique BD sur ce site.
Nous ouvrons notre rubrique "Club de lecture", habituellement alimentée par les chroniques du club de la librairie, à toutes celles et à tous ceux qui souhaitent parler de leurs lectures, écrire sur un roman, un essai... et qui voudraient partager leur enthousiasme avec d'autres.
"Le parfum des fleurs la nuit" Leïla Slimani - éd Stock. Avec son style incisif et sa clairvoyance prétrie de suspiscions sur notre humanité, Leïla Slimani a bien voulu se prêter à ce « jeu » littéraire, unique en son genre, proposé par sa maison d'édition : passer une nuit seule dans un musée. On choisira pour elle. Venise. La Punta della Dogana.C'est alors une plongée angoissante et des plus intimes que Leïla Slimani nous fait vivre avec une tension digne des meilleurs polars. On valse avec elle au milieu des œuvres et des questionnements sous-jacents des artistes blessés qui tentent éternellement de soigner leurs cicatrices en rendant vivant, pour l'éternité, leurs réalisations.L'expérience est réussie. Le lecteur ressort chaviré et conquis par cette sortie littéraire inédite et l'écrivaine très certainement changée si l'on retient ce qu'elle en conclut : « j'ai pu penser que l'écriture me procurerait une identité stable, qu'elle me permettrait en tout cas de m'inventer, de me définir hors du regard des autres. Mais j'ai compris que ce fantasme était une illusion ». CC
Vanessa SPRINGORA, « Le consentement » édition Livre de poche, janvier 2021
Camille KOUCHNER, « La familia grande », édition Seuil, janvier 2021
Lorsque l'on choisit l'écriture comme arme pour se guérir du non-dit, de l'impensable et de la culpabilité, on empreinte sûrement le chemin de Vanessa Springora et de Camille Kouchner. A travers le LIVRE, l'hydre et « G » sont définitivement condamnés au-delà de toute prescription à leur peine capitale : celle d'y rester éternellement enfermés dorénavant pour avoir osé, en toute impunité, violer les corps purs, les âmes intègres, la confiance en l'Autre.
Ces deux témoignages, remarquablement narrés, marquent probablement définitivement le droit de dénoncer, en dehors du corpus judiciaire, l'atteinte au corps la plus violente. Cette prise de conscience du lecteur ne peut maintenant que nous faire admettre que le simple fait d'être mineur doit dispenser notre droit de toute recherche d'un consentement. CC janvier 2021
« La voyageuse de nuit » de Laure Adler - Edition Grasset. Avec sa plume toujours aussi incisive, Laure Adler mène une enquête à travers les sentiers sociologiques, historiques et littéraires de l'idée que l'on peut se faire de la vieillesse. De toute évidence, en témoignant également de l'ensemble de ses propres questionnements sur son passage dans l'âge non « politiquement correct », Laure Adler met en exergue l'intensité de l'existence à vivre « Vieux » avec un optimisme objectif que son mentor, Simone de Beauvoir, ne s'est peut-être pas autorisé il y a 50 ans. A travers ce livre aux sources et références extrêmement fournies, l'auteur nous invite à faire évoluer notre vécu du grand âge présent ou à venir avec un regard qui évolue sans cesse sur notre capacité à bien vieillir. A lire à tout âge ! CC - Novembre 2020.
« Impossible » - Érri De Luca n- éd Gallimard. La trahison n’était pas dans le même camp ! Le jeune magistrat formé aux lois de la justice, engage son interrogatoire sur « une impossible coïncidence » face au suspect, ancien militant révolutionnaire qui lors d’une ascension dans les Dolomites et une rencontre fortuite, aurait pu faire basculer dans le vide cet homme qui 40 ans plus tôt livra ses compagnons militants pour sauver sa peau ! Dans ce huis clos de question-réponse Erri de Luca, par l’aisance de son style simple et fluide, crée une touchante intimité avec le lecteur, partage son humanité, ses réflexions philosophiques et métaphysiques, et ses questionnements sur l’engagement politique, la fraternité (loi impossible) et la fragilité humaine. Lecture fascinante et engagements réconfortants « Permettez-moi de vous citer un vers de Phèdre de Racine : Ma vengeance est perdue, S'il ignore en mourant que c'est moi qui le tue. » (page 45). ML - Novembre 2020.
« Crénom, Baudelaire ! » - Jean Teulé -éd Mialet Barrault. Jean Teulé se place, avec l’humour exacerbé que nous lui connaissons et un langage chantourné, en chroniqueur au rayon petites vertus et grand désagréments, d’un Baudelaire merveilleux poète fourvoyé en spécialiste du « Mal ». Le télescopage entre ces deux esprits se foudroie en un faire valoir de poèmes à la sensibilité extrême du mal transcendé, devenu fleurs. Les discours, imaginaires, entre Baudelaire et son inconditionnel éditeur sont savoureux de naïveté de part et d’autre. Le style narratif et romanesque de Jean Teulé recrée, dans une folie contextuelle, en volume et intensité, la vie dépravée du poète qui sombra dans les souffrances profondes du corps et de l’esprit, et instille au lecteur une émouvante compassion pour Baudelaire qui, malgré une fin des plus désastreuses, enfermé dans un sidérant « crénon » laisse à la postérité une œuvre magistrale d’une cruelle beauté. ML - Novembre 2020.
"Je suis le carnet de Dora Maar" de Brigitte Benkemoun éd Stock. Dresser le portrait d’une artiste à partir de la place qu’occupent ses amis dans sa vie : telle est l’idée de départ de Brigitte Benkemoun, auteure du livre Je suis le carnet de Dora Maar, publié chez Stock. Un jour, elle récupère par hasard le répertoire de Dora Maar daté de 1951 et se lance dans une enquête qui va durer deux ans. Dans ce carnet figurent les noms des plus grands artistes du XXème siècle, photographes, peintres ou poètes. Parmi eux : Aragon, Brassaï, Cocteau, Eluard, Giacometti. Et bien sûr Picasso, avec lequel elle entretient une relation de 1936 à 1943 et qui la peint « en femme qui pleure ». Franchement, elle a des raisons de pleurer. Aujourd’hui, on qualifierait de « pervers narcissique » le comportement de Picasso à son égard. Chaque nom décrypté donne lieu à un portrait croisé et permet de mieux appréhender cette période si riche sur le plan artistique. Brigitte Benkemoun en profite aussi pour décrire la façon dont chacun traverse la 2ème guerre mondiale. Eluard, par exemple entre dans la résistance tandis que Cocteau « se laisse aller à quelques envolées délirantes à la gloire d’Hitler ». Dora Maar fait partie de ceux qui « se contentent de vivre, à la fois sans compromission et sans rien faire ». Photographe professionnelle, puis peintre, très belle, borderline, devenue mystique après sa rupture avec Picasso, Dora Maar est un personnage pas toujours très sympathique, mais fascinant. Le Livre de Brigitte Benkemoun, lui, est passionnant de bout en bout. MD
"Scénario" Dan Franck éd Grasset. Comment écrire le scénario d’une série télévisée ? Choisir une histoire à raconter ? Planter un décor ? Déterminer les personnages récurrents ? Les lieux où ils vivent, leurs caractères, leurs noms … C’est à un voyage au sein du processus d’écriture que nous invite Dan Franck dans son livre publié chez Gallimard, intitulé tout simplement « Scénario ». Et franchement, pour ceux qui aiment écrire, c’est un régal. Pour le prix d’un seul livre, ce sont deux histoires qui sont ici racontées, celle qui se crée peu à peu sous nos yeux et celle que vit l’écrivain scénariste pour lui donner forme. L’auteur s’efforce de rendre crédibles tous les détails, peaufine les dialogues et vit littéralement avec ses personnages pendant 7 mois. Puis vient le temps du réalisateur et de la dépossession. Et c’est toute la différence entre un écrivain qui est un artiste libre et un scénariste, qui est un artisan travaillant pour d’autres. Dans une série ou un film, l’artiste, ce n’est pas le scénariste, mais le réalisateur. Martine D.
"Les services compétents" Iegor Gran - éd POL. Sélectionné sur le site de la librairie, Les services compétents d’Iegor Gran, publié chez Pol, est un livre plein d’humour qui fera voyager le lecteur confiné dans l’espace et dans le temps. Il s’agit en effet d’un récit qui se déroule dans l’ex-URSS, pays où l’auteur, français, a vu le jour il y a 55 ans. Dans les années 60, Nikita Khrouchtchev dirige le pays après la mort de Staline. C’est le « dégel », mais les services compétents, c’est à dire le KGB, contrôlent toujours étroitement la population. Leur mission : agir comme le « système immunitaire de la patrie » pour « éliminer les virus », n’importe quel citoyen parfaitement sain pouvant devenir « pathogène ». A travers la traque d’Abram Tertz, pseudonyme de l’écrivain dissident Andrei Siniavski qui est en réalité son père, Igor Gran dépeint un monde ubuesque. On y rencontre un lieutenant zélé, une flopée d’indics plus ou moins fiables, des jeunes avides de Pepsi cola et de jazz et des intellectuels souvent résignés. On assiste aux funérailles de Boris Pasternak, auteur du Docteur Jivago, livre interdit ces années-là. On (re)découvre les appartements communautaires, le marché noir, les queues devant les magasins « en déficit chronique » et surtout le fonctionnement des services pas toujours très compétents. Le ton est léger, les situations cocasses, mais la réalité plus tragique. Arrêté en septembre 1965, Andreï Siniavski est condamné à 7 ans de camp pour avoir publié des ouvrages à caractère « antisoviétique ». Il est libéré en 1971 après 5 ans et 9 mois d’emprisonnement et invité à quitter le pays. Lorsqu’il se réfugie en France avec sa famille, son fils Igor Gran a 10 ans. Martine D.
"Un deux trois" Dror Mishani - éd Gallimard Série noire. Dror Mishani est un écrivain israélien connu pour avoir publié plusieurs polars avec un héros récurrent, l’inspecteur de police Avraham Avraham. Son dernier livre, paru dans la collection série noire de Gallimard, n’a plus rien à voir avec cette série qui l’a fait connaître. Dans « Une, deux, trois, », il ne s’agit plus pour lui de décrire les enquêtes d’un homme, mais de dresser le portrait de trois femmes, Orna, Emilia et Ella, dans la société israélienne d’aujourd’hui. Très attachée à son fils de 9 ans, décrit comme différent, Orna souffre de son divorce et cherche sur les réseaux sociaux à rompre sa solitude. Emilia, la deuxième est étrangère. Elle a été recrutée en Lettonie par une agence spécialisée et travaille en Israël comme auxiliaire de vie auprès de personnes âgées. Très isolée, elle cherche à donner un sens à sa vie auprès d’un prêtre polonais et accepte quelques heures de travail supplémentaire chez le fils de son ancien employeur. Ella, enfin, prépare une thèse et travaille tous les matins dans un café où elle fait la connaissance d’un homme qui la drague alors qu’elle est mariée avec 3 enfants. C’est dans cette troisième histoire, au dénouement inattendu, qu’on découvre ce qui relie ces trois femmes. Dror Mishani a du être lui aussi une femme dans une autre vie tant il décrit ces personnages avec justesse et empathie. Son nouveau polar se lit d’une traite et fait voyager. Pas si mal dans cette période de confinement. Martine D.
"Jardin d'été" Hélène Veyssier - éd Arléa. En Provence, un soir de fête dans une villa, Anne s'enfuit avec un homme,abandonnant son mari et son fils de 5 ans, Jean. C'est brutal, violent, choquant pour tous ceux qui y sont mêlés. Jean est le narrateur principal, mais ce roman est un roman choral, d'autres voix interviennent. Elles témoignent, à tour de rôle, dans des chapitres courts et petit à petit l'histoire se dessine. Pas de jugement moral, juste le manque. Juliette C.
"Mes après-midi d’hiver" Anna Zerbib - éd Gallimard. Dans ce premier roman, Anna Zerbib raconte les après-midi d’hiver qui abritent son secret, son amoureux canadien Noah qu’elle cache à Samuel le compagnon français qui l’a suivie à Montréal. Ses pérégrinations erratiques au cœur de l’hiver montréalais la mènent de l’un à l’autre, du Plateau à Outremont, du Marché Jean Talon au Mont Royal, de la rue Saint-Denis au Saint Laurent. Ses descriptions de l’ambiance hivernale : la neige, le gel, le blizzard, les trottoirs glissants, la patinoire, les averses de pluie verglaçante «Les arbres en gelant, paraissaient sculptés en verre, la ville était fragile, près de se briser. » Son récit est émaillé d’expressions et de coutumes québécoises : la tuque, l’eau régulière au restaurant, les bottes d’hiver, les énormes manteaux qui prennent une place entière à la table du café. Mais Montréal, l’hiver canadien, Noah vont-ils l’aider à faire le deuil enfoui de sa mère, longtemps malade et récemment décédée, née dans le Nord, morte dans le Sud dont elle retrouve l’image au travers de ses déménagements successifs et de sa vie entre ses deux amoureux «Mon deuil était déjà une double vie, je voyais quelqu’un en secret . Un très beau texte sensible et vibrant d’émotion, à l’écriture rapide parfois heurtée, en plans-séquences, à coup sûr une auteure à suivre. Catherine G.
"La Septième Croix" Anna Seghers - éd Métailié. Allemagne, 1930. Sept prisonniers du camp de Westhofen en Rhénanie où sont détenus les opposants au régime nazi, se sont évadés. Six d’entre eux seront rapidement repris, seul Georg Heisler reste introuvable. Le roman est le récit choral de sa cavale d’une semaine, traqué par la Gestapo, à travers les villes (Hoechst et Mayence), le long du Main et dans la campagne rhénane que l’auteure décrit magnifiquement en quelques pages d’une poésie saisissante. L’auteure décrit ainsi la cathédrale de Mayence où Georg trouve un soir refuge « La pénombre était si profonde que les couleurs des vitraux s’estompèrent. Elle était parvenue au stade où les murs s’écartent, les voûtes s’élèvent, les piliers s’alignent à perte de vue… ». Mais ce roman raconte surtout le sentiment d’étouffement généré par le régime du IIIème Reich où chacun surveille chacun, craint son voisin, son frère, son fils. Anna Seghers explore les conditions d’une vie digne en situation extrême, opposant la lâcheté aux attitudes héroïques, aux gestes salvateurs, hardis, désintéressés. Dans ce roman dense rédigé en France entre 1937 et 1939 où elle était exilée depuis 1930 pour ses opinions politiques, Anna Seghers nous livre non seulement un document essentiel sur le quotidien du peuple allemand à l’époque nazie et sur l’inexorable emprise du régime sur tous les citoyens ; mais aussi une analyse implacable des relations humaines sous les régimes totalitaires. A lire absolument. Catherine G.